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La
peinture de BELLAGUET impose d'emblée au
regard les tables d'une syntaxe construite naturellement
portée vers 1'architecture. Géométrie singulière, a la fois
dure et souple, elle ne se fonde pas sur les signes
traditionnels — carre, sphère, triangle — de la tendance,
mais sur les éléments d'une grammaire librement inventée,
dans laquelle : grilles récurrentes et ponctuations
hachurées, traces fugitives en suspens et réseaux linéaires
denses et discontinus, se superposent, se conjuguent et
s'interpénètrent avec des plages chromatiques inégalement ciselées.
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On
relèvera donc ici, l'originalité de la mise en page, axée sur un centre
organique souvent déhanché, anime
de
mouvantes conjectures : l'approche spatiale instable et ambigüe qui
diversifie les codes de lecture, a l'écart
des
termes donnés du vocabulaire constructiviste : le
flux
agissant de la calligraphique, jusque dans ses plus
aventureuses proliférations ; la sureté décisive de chaque
trait ; le rôle non astreignant du support : enfin le
prestige déterminant de la couleur, dont l'application
crée la forme sans jamais la réduire, engendre l'espace,
sa résonance, et repousse les frontières illusoires de la
surface. Dans cet enchevêtrement concerté, tissé de réserves et d'entassements, l'éclatement contenu des formes alimente un discours fragmenté qui, loin de dissiper la pensée motrice donne son sens unitaire au tableau. D'ailleurs, ainsi que Barthes l'a énoncé, « si le fragment est comme l'idée musicale d'un cycle : chaque pièce se suffit et cependant elle n'est jamais que l'interstice de ses voisines : l'œuvre n'est faite que de hors-texte ». C'est de cette idée musicale, de cette ligne mélodique qui irrigue la fermeté des structures d'un lyrisme maîtrisé qu'émane, a travers les scansions |
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des lignes de
force
et leurs contrepoints hors-texte, le charme énigmatique
de cette écriture dont les composants ne se
référent a aucun autre lieu qu'au lieu même de la
peinture. On notera encore au sein de ce travail en extension, la maîtrise du geste dans son élan premier, par un ordre régulateur qui définit d'une juste harmonie 1'équilibre de plans. Et cet ordre est dans la mesure, dans la synthèse malgré parfois la profusion, dans cette recherche sans cesse réitérée de 1'essentiel mais jamais dans la froideur. L'exigence du sacrifice, la précision sobre et volontaire du style, ne sauraient dissimuler le raffinement des nuances, la pureté des échanges contrastés et par la même, la diserte affectivité qui les ceint. Amalgame d'intuition et de réflexion, tout a tour fragile et ancré dans ses affirmations, 1'art de BELLAGUET, au delà de son apparente réserve, réfléchit une vive effervescence intérieure. Univers silencieux, patiemment compose mais néanmoins fantasmatique, il met a jour les strates d'une géographie intime ouverte sur le monde. Gerard XURIGUERA |
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